FRAGILE Suisse : pouvez-vous nous parler un peu de la période qui a suivi l'accident de votre femme ? Comment s'est déroulé l'hôpital/la rééducation et le retour à la maison ?
Niklaus G : après l'accident, ma femme a passé un mois aux soins intensifs. Elle a ensuite passé huit mois en clinique de réadaptation, puis trois mois en habitat protégé. Je lui rendais souvent visite, les ami⸱e⸱s et la famille étaient également très présent⸱e⸱s auprès d'elle. Malheureusement, nous avons dû nous isoler pendant un certain temps à cause du coronavirus, ce qui a été une période difficile pour nous. Je voulais être avec elle et la soutenir, mais je ne pouvais pas.
Aujourd'hui, elle est de retour à la maison depuis plus d'un an et demi, et elle est autonome pour la plupart des choses. Nous nous répartissons les tâches du mieux que nous pouvons. Heureusement, son hobby est le ménage - la cuisine et les tâches administratives sont en revanche de mon ressort. Nous faisons les courses ensemble.
Dans les moments difficiles, le doute s'installe aussi. Est-ce que la situation était parfois beaucoup pour vous et avez-vous peut-être même pensé à vous séparer ?
Il n'a absolument jamais été question de cela. Pour moi, il était clair que nous traverserions cette épreuve ensemble et que nous trouverions un moyen. Je ne peux pas dire si ce serait différent en cas de paralysie totale ou d'alitement. J'ai appris à gérer la situation et nous nous en sortons bien ensemble.
Bien sûr, j'aurais souhaité plus de soutien dans de nombreux domaines. Mais les ami⸱e⸱s et la famille sont impliqué⸱e⸱s dans leur travail et leur environnement et n'ont qu'un temps limité. Et je n'avais aucune idée du fonctionnement du système et de ses possibilités au début.
Pourriez-vous être plus précis ? Avez-vous essayé d'obtenir de l'aide pour vous-même ?
Oui, j'ai essayé. Mais où chercher quand on n'a aucune idée ? J'avais surtout besoin d'une aide active, qui aurait pu me soulager. J'ai pu en obtenir en partie grâce à un service de nettoyage via Spitex, mais seulement après être sorti de la clinique suite à un burn-out, probablement aussi en raison de l'accident de ma femme.
Vous êtes membre de FRAGILE Zürich. Dans quelle mesure leurs offres vous ont-elles aidé ?
La participation au groupe de proches de FRAGILE Zürich a été pour moi une bonne occasion d'échanger avec d'autres personnes. J'y ai également reçu quelques conseils que je peux appliquer au quotidien.
FRAGILE Zurich a organisé l'année dernière une manifestation sur le thème « Faire face au destin de la lésion cérébrale. Où puis-je trouver la force en tant que proche ? Où puis-je obtenir du soutien ? ». Lors de la table ronde, vous avez représenté le point de vue des proches et parlé de votre situation. Pour celles et ceux qui n'ont pas pu participer, que faudrait-il, selon vous, pour améliorer la situation des proches ?
Les premières institutions où les patient⸱e⸱s arrivent, ainsi que les institutions de suivi (réadaptation) devraient informer les proches et leur montrer les possibilités qui s'offrent à elles et eux. Il ne suffit pas de mettre une feuille d'information à disposition. Il faudrait qu'il y ait des spécialistes qui puissent prendre du temps pour les proches et les accompagner.
Il faut également un meilleur soutien financier. Ma femme continue à suivre des thérapies, qui sont toutes facturées différemment. Par exemple, la physiothérapie, qui est très importante, doit désormais être réglée par la caisse maladie.
De nombreux messages du public ont appuyé vos déclarations sur le manque d'accompagnement spécialisé après la sortie de la clinique de réadaptation. Connaissez-vous l'offre « Un guide à vos côtés » de FRAGILE Suisse ? C'est précisément là qu'elle intervient : un spécialiste accompagne les personnes concernées et leurs proches directement après la phase hospitalière et leur montre les différentes possibilités pour la suite.
Non, je n'ai pas encore entendu parler du projet « Un guide à vos côtés ». C'est dommage que l'offre n'existe pas encore à Zurich et que je n'ai pas pu en profiter après l'accident de ma femme. Car il semble que c'était exactement ce qui me manquait.
Revenons à vous personnellement. Au-delà de la frustration, de la colère et de la douleur, diriez-vous que cette expérience vous a rapproché de votre femme ? Vous sentez-vous plus proches qu'auparavant ?
Oui, mais avec la conséquence que je dois faire plus attention et me brider. J'en ai pris conscience et je dois y travailler en permanence.
Quelle est l'activité que vous aimez faire ensemble ?
Outre les achats quotidiens, nous aimons faire des excursions en train. L'avantage, c'est qu'elle a une carte d'accompagnement CFF. Cela permet de ne payer qu'un seul billet lorsque nous voyageons ensemble.
Qu'est-ce qui vous donne un bon équilibre ?
Mes hobbies : le chant, la généalogie et, depuis peu, mon travail. Cela comprend également l'organisation de manifestations, d'événements, ce qui est quasiment mon cheval de bataille. Et enfin, la foi.
En dernier lieu, je voudrais dire ceci : Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez dire aux autres membres de votre famille ?
Priez, vous savez. Ne perdez pas la foi.
Ne pas se replier sur soi-même, même si c'est souvent plus facile à dire qu'à faire. Accepter de l’aide. Bien sûr, ces offres d’aide doivent être identifiées et adaptées. Tous les cas ne sont pas identiques. En termes modernes : le travail en réseau est important. Sortir, même si le partenaire concerné n'en a pas forcément envie ou n'y prend pas grand plaisir. Il faut parfois faire beaucoup d'efforts de part et d'autre, mais il est extrêmement important de maintenir des contacts sociaux ou d'en nouer de nouveaux.