La solitude chez les personnes cérébrolésées

Communiqué de presse de FRAGILE Suisse

Communiqué de presse de FRAGILE Suisse

Lausanne, le 25 septembre 2018 – Selon l'Office fédéral de la statistique, 36% de la population suisse se sent seule. Ce mois-ci, FRAGILE Suisse, l'association suisse pour les personnes cérébrolésées et leurs proches, attire l’attention sur la question de la solitude chez les personnes victimes d’une lésion cérébrale. Retour sur nos entretiens passionnants avec Martina Hoffmann, neuropsychologue et deux personnes cérébrolésées.

Martina Hoffmann, que signifie la solitude? Doit-on la considérer comme une maladie?

«Il faut bien faire la distinction entre «être seul-e» (c’est-à-dire être isolé-e socialement) et «se sentir seul-e». En fait, le terme de solitude décrit le sentiment de solitude. Se sentir seul-e ne veut pas forcément dire être véritablement seul-e. On peut vivre au sein d’une famille, d’un réseau de relations et se sentir seul-e. La solitude n’est pas une maladie, mais si quelqu’un en souffre pendant longtemps, cette situation peut favoriser l’apparition de réactions de stress ou de maladies comme une dépression, une dépendance, etc. Néanmoins, «être seul-e» ne doit pas obligatoirement être considéré comme quelque chose de négatif. Les personnes cérébrolésées considèrent même parfois cet état comme reposant.»

Pourquoi la solitude est-elle une thématique importante chez les personnes cérébrolésées?

«La solitude est souvent liée aux changements. Or, une lésion cérébrale est un changement de taille car elle a des répercussions sur la vie familiale, les relations avec les amis, l’activité professionnelle, les loisirs et les possibilités financières. À cause de leurs handicaps cognitifs ou de la diminution de leur capacité de résistance, de nombreuses personnes cérébrolésées ne peuvent plus participer à la vie sociale comme avant. Elles ont donc moins d’occasions pour nouer des liens sociaux, ce qui peut favoriser l’isolement et par conséquent, le sentiment de solitude. De plus, pour les personnes extérieures, il est souvent difficile de reconnaître et de comprendre l’étendue des séquelles invisibles. Cela peut conduire les personnes cérébrolésées à se sentir «seules au monde»et incomprises, ce qui risque de favoriser le sentiment de solitude.»


Témoignages de deux personnes cérébrolésées

Il y a 7 ans, Christine O. a été victime d’une attaque cérébrale. Pour Heidi F., 15 années se sont déjà écoulées depuis sa rupture d’anévrisme. Les deux femmes se confient sur leur expérience de la solitude.

Pour vous, qu’est-ce que la solitude ?

Christine: «Pour moi la solitude, ce n’est pas d’être sans personne autour de soi, c’est le sentiment d’être incompris malgré les efforts de l’entourage.»

Heidi: «Lorsque je ne ressens pas ou ne comprends pas ce que quelqu’un d’autre exprime, c’est le début de la solitude. La solitude est le manque de sentiment d’appartenance.»

Quand vous sentez-vous seule?

Christine: «C’est toujours lié à ce sentiment d’incompréhension. Par exemple, l’autre jour j’ai voulu faire mon ménage et je n’y arrivais pas à cause de mon bras. Alors je me suis énervée et me suis mise à pleurer. Les autres se demandent pourquoi je m’obstine à vouloir faire quelque chose que je ne peux pas faire. J’ai besoin d’essayer quand même et de réussir, au moins un petit peu. Cela entraîne de gros problèmes. Dans ces moments-là, je me sens seule car j’ai le sentiment que personne ne comprend pourquoi je m’accroche autant. Je dois faire un travail sur moi-même et apprendre à lâcher prise.»

Heidi: «Je me sens seule quand beaucoup de gens sont autour de moi ou quand je ne comprends pas quelque chose. Alors je dois demander ce que j'ai à faire. Je me sens ensuite comme une enfant. Je ne peux plus me connecter avec les autres comme je le pouvais avant la lésion cérébrale. Suite à ma rupture d’anévrisme, je ne reconnaissais plus ma mère, mon mari et mes fils. Ils étaient tous des étrangers pour moi.»

Comment faites-vous face à la solitude ?

Christine: «Après m'être beaucoup énervée, avoir pleuré ou m’être fâchée avec mon entourage, vient le moment où j’abandonne car c’est trop pour moi. Alors je me dis que c’est assez pour aujourd'hui et que j'essaierai une autre fois.»

Heidi: «Je quitte immédiatement l'événement et cherche le calme. Si le sentiment est très fort, je ne sors pas du tout, sinon ça me frustre constamment.»

Lien utile

Pour en savoir plus sur la thématique de la solitude chez les personnes cérébrolésées, consultez le dernier numéro de notre journal FRAGILE Suisse: https://www.fragile.ch/fr/journal/

Communiqué de presse en PDF

Télécharger le PDF