«La situation liée au coronavirus est aussi une chance»

La période extraordinaire dans laquelle nous vivons change beaucoup de choses, également pour la prestation d’«accompagnement à domicile» de FRAGILE Suisse.

La période extraordinaire dans laquelle nous vivons change beaucoup de choses, également pour la prestation d’«accompagnement à domicile» de FRAGILE Suisse.

Julia Eugster

Julia Eugster

La période extraordinaire dans laquelle nous vivons change beaucoup de choses, également pour la prestation d’«accompagnement à domicile» de FRAGILE Suisse. Julia Eugster, responsable de cette prestation, nous confie comment se déroule son quotidien dans ces circonstances particulières.

Pour respecter les mesures de protection préconisées par la Confédération, les visites à domicile sont supprimées dans la mesure du possible. Cependant, lorsque la situation l’exige, les professionnelles de l’accompagnement se rendent chez les clientes et clients. Julia Eugster, responsable de l’«accompagnement à domicile», vient d’effectuer une telle visite.

Julia, est-ce que ta journée te laisse une impression différente si tu la compares aux visites que tu faisais auparavant?
Les contacts entre la professionnelle et le client ou la cliente ont lieu si possible par téléphone ou visioconférence. Nous rendons visite à notre clientèle uniquement lorsque c’est indispensable. C’est arrivé, par exemple, avec un client qui ne parvenait pas à suivre les instructions et les conseils que nous lui donnions par téléphone.  

Qu’est-ce qui se passe différemment?
A cause du virus, je veille à écourter mes visites et, si possible, je garde une distance de deux mètres avec le client ou la cliente. Comme cette précaution ne peut pas toujours être respectée, nous portons un masque pendant les visites à domicile.

Comment la clientèle réagit-elle à cette nouvelle situation?
Cela dépend. Il y a des clients qui ne veulent pas que nous passions. Ils font partie de groupes à risque et veulent se protéger. Cependant, il y a aussi des personnes qui ont besoin que nous venions chez elles. Elles sont désespérées parce qu’elles ont perdu leur réseau social, leur travail, les activités qui les aidaient à structurer leurs journées. Presque tous les contacts sont suspendus, et si la professionnelle ne vient plus, ces personnes sont encore plus désemparées. Il y a aussi des clients qui me disent apprécier le calme. Avant, ils avaient des difficultés à gérer leurs nombreux rendez-vous et activités, telles que travail, thérapies, loisirs, tout en se ménageant des moments de repos.

Vous vous limitez aux visites indispensables. Comment faites-vous maintenant pour venir en aide aux clients?
De nombreux client s doivent lutter contre l’incertitude et la peur. Les professionnelles de FRAGILE Suisse les aident en leur téléphonant, en communiquant avec eux par visioconférence ou encore en leur rendant visite quand c’est indispensable. Au lieu des visites régulières, nous proposons des conférences téléphoniques courtes mais plus fréquentes. Nous restons en contact par texto ou par courriel. Ce sont les moyens que nous utilisons pour rassurer un peu nos clients.

Dans la situation actuelle, quel est le principal défi pour l’accompagnement à domicile?
Parfois, les personnes cérébrolésées n’osent pas dire ce dont elles ont besoin, ou alors elles se surestiment. Du fait de la distance avec les clients, il est difficile pour les professionnelles de cerner le soutien qui leur est nécessaire.

Est-ce que cette situation est aussi une chance?
Je considère que la situation actuelle n’est pas seulement une crise, mais sans aucun doute aussi une chance. Elle contraint un peu les personnes cérébrolésées à faire preuve de davantage d‘indépendance. Les gens qui auparavant n’osaient pas téléphoner, n’ont actuellement pas d’autre choix. Maintenant, ils téléphonent, alors qu’avant, ils avaient peur de le faire. Ils saisissent ainsi une occasion de progresser qui leur est offerte.

Voudrais-tu dire quelque chose au sujet de l’accompagnement à domicile? Indépendamment de la situation actuelle?
Oui, bien sûr! Le financement de l‘accompagnement à domicile n’est pas encore assuré dans tous les cantons. Dans certains d’entre eux, les clients doivent le payer eux-mêmes. Il y certes, des organismes tiers qui le financent en partie. Mais, en principe, la situation n’est pas la même que pour les personnes résidant dans un home. Ces séjours sont payés par le canton. Il y a cependant quelques cantons qui financent l’accompagnement à domicile ambulatoire. Je souhaite vraiment que les clientes et clients ne soient plus obligés de payer eux-mêmes cette prestation. L’accompagnement à domicile de FRAGILE Suisse n’est certes pas «cher» en soi, mais pour les clients, il s’agit de beaucoup d’argent. Il est pourtant certain que cette prestation encourage l’autonomie des personnes cérébrolésées.

Remarque de la rédaction: l’interview a été réalisée en avril par visioconférence, pendant la période de pandémie.

Interview: Juliana Campos

En savoir plus sur l'accompagnement à domicile