Quelle a été votre première pensée après avoir franchi l’arrivée?
Il y avait tellement d’émotions que tout était embrouillé dans ma tête. C’était un moment spécial. J’ai été escorté par la police à travers la ville [Saint-Jacques-de-Compostelle], il y avait des gens partout qui applaudissaient, c’était très émouvant. Je n’ai pas eu le temps de penser, j’étais tellement pris par l’émotion. C’était quelque chose d’incroyable, il fallait le vivre pour le croire. Il y avait une ferveur incroyable sur la place à Santiago, des centaines de personnes m’applaudissaient et scandaient mon nom. J’ai cru que c’était pour quelqu’un d’autre, je me suis retourné et me suis dit «c’est pas possible» *rires*. Mais ma première pensée était bien sûr de retrouver mon épouse. Durant les semaines qui ont précédé mon arrivée, tout mon chemin depuis l’accident est repassé dans ma tête. Toutes ces souffrances pour en arriver là: ça en valait la peine.
Quel fut le meilleur moment de votre voyage? Et le plus difficile?
Le meilleur moment : Quand je suis arrivé à Saint-Paul-lès-Dax en France, où j’ai été reçu par l’association AVC AIT Carpe Diem et la mairie. C’était un moment très intense. J’avais l’impression qu’enfin, nous les handicapés, nous avions une écoute du public. Nous avons pu avoir des échanges avec des politiciens, c’était intéressant. Je n’oublierais jamais cet accueil si chaleureux.
Le plus difficile: L’Allemagne, le Danemark et la Belgique où il pleuvait un jour sur deux. C’était difficile moralement. Il y a des moments où je n’avais plus envie de me remettre sur le vélo, mais j’y suis arrivé. J’ai utilisé la même mentalité que pour mon AVC, c’est un jour après l’autre, un coup de pédale après l’autre. Avancer gentiment, mais avancer.
Pourquoi le projet Ride For Stroke a-t-il suscité un tel engouement de la part du public et des médias?
Les valeurs que je défends ont sûrement interpellé les gens. Malgré la difficulté, on peut continuer à avancer. Cette volonté et ce courage ont peut-être impressionné les gens. Pour moi, tout est possible, il suffit d’y croire. C’est ce que je voulais transmettre aux victimes d’AVC: il faut continuer d’y croire. Il ne faut pas abandonner et rester positif. J’ai eu l’occasion d’abandonner et j’y ai parfois pensé, mais je chassais vite ces pensées de ma tête. Il faut continuer à aller de l’avant, tout le temps.
Vous n’avez pas été seul dans cette aventure, Parlez-nous du soutien de vos proches et des personnes sans qui l’aventure n’aurait pas été possible.
J’ai pu compter sur un fort soutien autour de moi. Fernando, mon chauffeur accompagnant, était là tous les jours pour conduire et me soutenir. Il est également membre de FRAGILE Valais et a subi un AVC en 2016. Mon épouse m’a fourni un soutien moral chaque jour. Elle m’a remis en selle quand ça commencé à dérailler. J’ai aussi passé une semaine de moments privilégiés avec un de mes fils.. J’ai également reçu la visite de plusieurs amis sur le parcours. Tous ont été des soutiens incroyables.
Une chose que vous aimeriez que les gens sachent sur les AVC?
Les séquelles invisibles, les problèmes liés à la gestion des émotions. Ça change les relations avec les gens, car on réagit de manière différente. Le regard des gens est souvent problématique. Par exemple, j’étais dans les dernières étapes en Espagne, avec une autre personne handicapée et j’avais besoin d’aller aux WC. On s’est alors arrêté dans un bistro. Une mère de famille qui s’y trouvait me voit et se tourne vers ses enfants en disant: «Oh regardez le monsieur avec la jambe en bois». Alors j’ai dit: «Je n’ai pas une jambe en bois Madame, je suis hémiplégique.» C’était entre le comique et le tragique. Les gens sont souvent ignorants.
Quelle est la suite pour vous?
Ce projet fait partie du chemin de reconstruction de ma confiance en moi qui a été détruite après mon AVC. J’ai perdu confiance en tout, je me disais que tout pouvait m’arriver du jour au lendemain. C’était donc une bonne étape dans ce processus. J’ai des idées de projets pour la suite, notamment des activités pour les personnes cérébrolésées. Mais pour l’instant j’ai surtout besoin de me reposer. Mon prochain projet est de m’occuper de moi *rires*.
Un mot de la fin pour les personnes qui vous ont suivies et soutenues?
Un grand merci à tous les sponsors et les gens qui m’ont soutenu. Un merci tout spécial à Fernando qui était là tous les jours et m’a supporté et à mon épouse et mes enfants. Tout est possible, il suffit d’y croire.
FRAGILE Suisse tient à féliciter et remercier chaleureusement Christian Salamin pour son engagement à toute épreuve pour la cause de l’AVC et pour l’association FRAGILE Valais.
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